Exploration à travers le timbre

Les échanges autour d’un café réservent parfois quelques surprises. En discutant de nos projets respectifs, en échangeant sur les répertoire, on saisit, tout à coup, que les airs des chansons qui nous intéressent sur le moment, se ressemblent étrangement. Certains sont même si proches que l’on bascule de l’un à l’autre sans s’en rendre compte ; entonner le premier empêche de chanter le second, on ne sait plus quelle phrase musicale appartient à quel air. Plus on les chante, plus on les confond. Les deux premiers en appellent un troisième, puis un quatrième … C’est une glissade sans fin d’airs en airs, de phrases en phrases, de motifs en motifs.

Après un autre café, l’idée de prendre ce continuum comme sujet de recherche artistique est apparue : pourquoi ne pas réunir toutes ces chansons en un seul objet, et de le penser comme un seul morceau, une seule œuvre musicale ?

De là est né cette opération que nous avons appelée « Exploration à travers le timbre ».

Lumière sur la fougère

Un timbre est un « air préexistant aux paroles qui lui sont adaptées pour constituer une nouvelle chanson » (Science de la musique, Marc Honegger). Les timbres ont beaucoup été utilisés par les chansonniers, particulièrement au XVIIIème et XIXème siècles. On les retrouve dans un grand nombre de chansons populaires. Ces airs ont été compilés dans des recueils appelés « Clé » (« Clé des chansonniers », « Clé du caveau » …).

Si la notion de timbre n’est jamais formulée par les interprètes de chanson populaire de transmission orale (dite chanson traditionnelle), l’idée de chansons sur des airs préexistants semble sous-jacente. Une ressemblance mélodique apparaît en effet régulièrement lors de l’exploration ou de l’interprétation d’un grand nombre de ces chansons. Les phrases mélodiques peuvent être comparées et un « archétype mélodique » qui semble préexister surgit. Il met en évidence des filiations entre les airs support.

Tout se passe comme si chaque chanteur réinterprétant une chanson qu’il a acquise oralement, la modifie alors selon ce qu’il a retenu et ce qui, inconsciemment, lui paraît le mieux porter ses paroles. Nous avons donc affaire à un timbre qui n’est pas « revendiqué » lors d’une composition mais « induit » lors d’une transmission.

Lumière sur la Fougère est la première œuvre exploratoire de cette opération que nous avons appelée « Exploration à travers le timbre ».